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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/562

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les Allemands. Tandis qu’on reprochait à l’empire d’Allemagne le morcellement, l’anarchie et l’impuissance, au point de vue de Mœser, le grand nombre des petits États paraissait justement ce qu’il y a de plus désirable pour le développement de la culture particulière, selon les besoins qui résultent de la situation et de la nature des diverses provinces ; et quand Mœser, sortant des limites de la ville et de l’évêché d’Osnabruck, et s’étendant sur le cercle de Westphalie, savait en exposer les rapports avec tout l’Empire, et, dans l’examen de la situation, rattachant le présent au passé, déduisait le premier du second et faisait voir de la manière la plus claire si un changement était digne d’éloge ou de blâme : chaque administrateur d’un État n’avait qu’à procéder de même dans son pays, pour apprendre à connaître parfaitement la constitution de son territoire et sa liaison avec les voisins et avec l’ensemble, et pour juger soit le présent soit l’avenir.

À cette occasion, on discourut sur les différences des États de la Haute et de la Basse-Saxe ; que, dès les temps les plus anciens, les productions naturelles, tout comme les mœurs, les lois et les coutumes, s’y étaient développées de manières diverses et avaient reçu de la constitution politique et de la religion des directions différentes. On essaya de caractériser un peu plus nettement ces différences, et cela même nous fit sentir combien il est avantageux d’avoir sous les yeux un bon modèle, qui, si l’on en considère, non pas les détails, mais la méthode, peut être appliqué aux cas les plus divers et, par lui-même, offrir au jugement un secours inestimable.

Pendant le dîner, nous continuâmes cette conversation, et l’on en conçut de moi une opinion peut-être plus favorable que je ne méritais. En effet, au lieu de diriger l’entretien sur les travaux dont j’étais moi-même capable, de demander pour le théâtre, pour le roman, une attention exclusive, je parus donner la préférence aux écrivains tels que Mœser, dont le talent émanait de la vie active et revenait aussitôt y déployer une action directement utile, tandis que les ouvrages poétiques, qui planent au-dessus du monde moral et sensible, ne peuvent être utiles que par un détour et d’une manière en quelque sorte accidentelle. Il en fut de notre conversation comme des Mille et