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Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/148

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murs disparaissent sous les armoires, les vitrines, les tableaux, les sculptures, les babioles, les reliques du bric-à-brac historique. Et c’est le marteau de Louis XVI forgé par ses mains royales, et c’est le sablier de Henri III, et ce sont les boucles de soulier de Louis XV, et c’est le couteau de chasse de Charles VIII, et c’est l’ordre de payer 1,500 livres à Lajouski le septembriseur, ordre signé : Philippe-Égalité. Et ici, une épreuve avant la lettre de la Promenade du Jardin du Palais-Royal de Debucourt, achetée en 1810, sur le Pont-Neuf, quinze sous ; là, un dessin des Forges de Vulcain, par Boucher, payé quarante sous.

Sur un nom prononcé par quelqu’un de nous, M. Fossé d’Arcosse, un long vieillard osseux, tout en feuilletant des paperasses qui tiennent de l’histoire : « Oui, oui, je vais y arriver, fait-il, je sais, il y a deux branches dans cette famille… et même une particularité curieuse : chacune de ces branches avait 100,000 livres de fortune sous Louis XIV. L’une a placé cette fortune en terres, elle a aujourd’hui 400,000 francs ; l’autre en rentes sur l’État : avec les réductions et les banqueroutes, son capital est réduit à 560 francs. »

Sous les arbres du café de la Comédie, nous sommes rejoints par Théophile Lavallée, aux traits truandesques, aux lèvres rouges et informes des masques de Venise dans les tableaux de Longhi. Il nous parle très curieusement de la religion laissée par Robespierre chez des amis, nous donnant des