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Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/148

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notre maison… la dernière près de ces arbres… la voyez-vous ? »

C’est la consolation du moment. Petits et grands viennent, de temps en temps, donner un coup d’œil à leur immeuble aimé. L’autre jour, un monsieur, que je ne connaissais pas, me demandait la permission de voir, d’une de mes fenêtres, la baie de son atelier, situé à Sèvres.

Ce soir, je rencontre le jeune Frédéric Masson, enterré dans sa capote de mobile. Lui, qui datait les lettres qu’il m’écrivait du collège, des brumaire et des messidor du calendrier républicain, je le trouve fort dégrisé de la république, des républicains, des soldats démocrates. Il se plaint que, lorsqu’il marchait avec Goubie en avant, ses frères n’emboîtaient point le pas. Et de sa mauvaise humeur contre le présent, un peu remonte à 89, et amène une baisse sensible de son lyrique enthousiasme d’autrefois pour la première république. Il est un symptôme. Je suis persuadé que beaucoup de jeunes gens ayant en eux-mêmes semblablement à Masson un grain d’exaltation révolutionnaire, sont en train de devenir des réactionnaires.

Mardi 22 novembre. — Dans le grand bois, où les tristesses de l’automne se mêlent aujourd’hui aux tristesses de la guerre : pas un promeneur, pas un errant, pas même un volètement de petit oiseau, seulement la plainte des vents, dans laquelle résonnent