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Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/283

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qui se mouche avec ses doigts, par la portière.

Des affiches, toujours des affiches, et encore des affiches. Le papier blanc du gouvernement fait de véritables épaisseurs sur les murs. L’affiche toute nouvelle, l’affiche du dernier quart d’heure, est l’affiche sur les cours martiales. Cette affiche étale sous les yeux de tous, la peine de mort, les travaux forcés, la détention, la réclusion, tout le barbare code pénal qui sert aux démocrates à fonder la liberté.

Devant le Gymnase, sur une chaise, une somnambule, les yeux bandés, et assistée de son magnétiseur, sibyllisant en plein boulevard.

Place de la Concorde, en tête de la rue de Rivoli, des ouvriers travaillent à une tranchée, large comme un fossé de rempart.

Un travail du même genre se fait à la naissance de la rue Castiglione, où les sacs de terre, à mesure qu’on les emplit, s’entassent sous les arcades.

À tout coin de rue, on rencontre des gens, hommes et femmes, portant à la main le sac de nuit, le sac de voyage, le petit paquet, avec lequel il est seulement possible de fuir Paris.

À ce qu’il paraît, les employés du Musée du Louvre sont très anxieux. La Vénus de Milo est cachée, devinez où ? À la préfecture de police ! Elle est même très profondément cachée, et dissimulée sous une première cachette, remplie de dossiers et de papiers de police, propres à arrêter les chercheurs dans leurs fouilles. On craint toutefois que Courbet ne soit sur la voie, et les peureux employés du Mu-