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Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/316

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japonaises sont amusées par des événements de la nature plus petits que ceux qui nous intéressent, nous autres Européens. Pour que la campagne nous parle, nous tente à la reproduire, il faut qu’elle se montre à nous sous de grands aspects, avec d’originales beautés, qu’elle soit dramatisée par un orage, par un coucher ou un lever de soleil.

Les Japonais, eux, ils ne demandent pas tant de choses. Je viens d’acheter une garde de sabre, où dans un ciel écorné par un quartier de lune d’argent, d’arbres qu’on ne voit pas, tombent à travers le ciel neigeux, deux jaunes feuilles d’automne. C’est là tout le motif de la ciselure, et ces deux feuilles, qui font tout le décor imaginé par l’artiste, composeraient également tout le libretto d’un poème de là-bas.

Ce soir, à la reprise des dîners du Temps (c’est ainsi que s’appelle l’ancien dîner Magny), Liouville faisait remarquer le nombre d’incomplets, d’estropiés, de gens avec un lobe cérébral trop développé et un membre atrophié, qui avaient joué un rôle dans la Commune. Il énumérait aussi les mystiques du gouvernement, ce qui me fait m’écrier : Il y aurait un joli titre pour les baptiser : Bancroches et mystiques.

Hébrard me parlant de Charles Blanc, à propos de l’article indécent commis contre Fromentin, article soufflé par Saint-Victor, me disait de l’académicien : « Il est de la nature de ces femmes qui peuvent voyager, en chemin de fer, avec un inconnu, qua-