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Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/104

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paysans qui s’étaient grisés avant, faisaient du bruit, son surplis déjà à moitié sorti de la tête, leur cria : « Eh ! là-bas, si vous continuez, vous savez que je suis capable de prendre l’un de vous par la moitié du corps, et avec lui, de jeter les autres à la porte. » C’est lui encore qui, dans une chute, s’étant à moitié fracassé la tête, et ayant à ses côtés un confrère poussant des hélas : « Ah ! je vois, vous voulez m’extrême-onctionner, mais vous n’y entendez rien, mon cher, avec votre figure de De profundis, moi, je fais cela à la gaieté. »

Puis l’échappé dans le fond du Berri du bureau des Pompes funèbres, et des soirées aux Batignolles du ménage Callias, nous contait ceci :

Mme Callias était devenue folle à la fin de sa vie, et sa folie consistait en ce qu’elle croyait qu’elle était morte. On lui demandait comment elle allait une, deux, trois fois. Elle ne répondait d’abord pas, mais enfin à la troisième, fondant en larmes, elle vous soupirait, dans un rire de folle : « Mais je ne vais pas, puisque je suis morte. » Alors, il était convenu qu’on lui disait : « Oui, oui, vous êtes bien morte… Mais les morts ressuscitent, n’est-ce pas ? — Elle faisait un signe de tête affirmatif, — et peuvent jouer du piano ? » Alors prenant le bras que vous lui tendiez, elle allait s’asseoir au piano, où elle jouait d’une manière tout à fait extraordinaire.

Et l’on se sépare, en disant qu’il faut faire vulgariser par Gibert dans les salons, la musique de Rollinat, qui ne lui aurait encore rapporté que cent soixante-quatorze francs.