Aller au contenu

Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lundi 14 janvier. — L’émotion de la bataille théâtrale, je la supporte très bien, excepté au théâtre ; là, mon moral n’est pas maître de mon organisme, je sentais hier à l’Odéon, mon cœur battre plus vite sous un plus gros volume.

On finira par m’exorciser, ici comme le diable du théâtre. Pélagie rougit à la dérobée de me servir, et n’a pu s’empêcher toutefois de me dire aujourd’hui : « Vraiment, tout le monde à Auteuil trouve votre pièce pas une chose propre ! » et cette phrase dans sa bouche est comme un reproche de sa propre humiliation. Ah ! les pauvres révolutionnaires dans les lettres, dans les arts, dans les sciences !

Mercredi 16 janvier. — M. Marillier, agrégé de philosophie, qui a fait un article en faveur de Germinie Lacerteux, vient me voir. Il a assisté à six ou sept représentations, a étudié le public, et me donne quelques renseignements curieux. J’ai pour moi tous les étudiants de l’École de médecine, et pour moi encore les étudiants de l’École de droit, — mais ceux qui ne sont pas assidus au théâtre, les étudiants pas chic, les étudiants peu fortunés. Le monde des petites places est également très impressionné par la pièce, et M. Marillier me disait, que les étudiants avec lesquels il avait causé, étaient enthousiasmés de l’œuvre.

À neuf heures je quitte la rue de Berri, et me voici