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Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/187

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Mardi 28 octobre. — C’est étonnant, comme toute ma vie, j’ai travaillé à une littérature spéciale : la littérature qui produit des embêtements. Ç’a été d’abord les romans naturistes que j’ai écrits, puis les pièces révolutionnaires que j’ai fait représenter, enfin en dernier lieu le Journal. Il y a tant de gens auxquels la littérature ne fait que rapporter des caresses pour leurs nerfs.

Aujourd’hui, sur ma demande, on m’envoie de l’Écho de Paris un reviewer, que je charge de répondre à l’attaque de Renan, en lui remettant le canevas de la réponse.

Voici le petit morceau de prose qu’il a dû mettre en dialogue, sans y changer, sans y ajouter rien :

— Vous avez lu l’interview de la France à propos de votre Journal sur le siège de Paris et la Commune ?

— Oui je l’ai lu avec un certain étonnement, car voici le portrait que je faisais de Renan, dans l’avant-dernier volume paru : « L’homme toujours plus charmant et plus affectueusement poli, à mesure qu’on le connaît et qu’on l’approche. C’est le type dans la disgrâce physique de la grâce morale ; il y a chez cet apôtre du doute, la haute et intelligente amabilité d’un prêtre de la science. »

Oui, je suis, ou du moins j’étais l’ami de l’homme, mais parfois l’ennemi de sa pensée, ainsi que je l’écrivais dans la dédicace de l’exemplaire à lui adressé.

En effet, tout le monde sait que M. Renan appar-