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Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/112

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de déférence, de devoir envers mes acteurs — je me risque, j’attrape le chemin de fer, j’arrive à la gare Saint-Lazare, où le cocher qui doit me mener chez Riche, demande à un camarade le chemin pour m’y conduire, par ce temps : à quoi le camarade répond qu’il n’y parviendra jamais par le boulevard.

Chez Riche, je trouve Scholl, en train de dîner, et qui n’ose s’aventurer place du Châtelet, à l’Opéra-Comique, où il a une place, pour la première de Werther.

Une voiture consent à me mener aux Menus-Plaisirs, où sur la demande d’Antoine, je l’ai autorisé à jouer : À bas le Progrès, à la fin du spectacle.

En attendant qu’on me joue, je me dissimule dans le fond de la loge de Daudet, et j’assiste à la pièce danoise de Strindberg : Mademoiselle Julie, dans laquelle la pauvre Nau est fortement empoignée.

Enfin me revoilà dans un placard sur le théâtre. J’avais peur de la scène politique, mais tout passe, la scène politique et les autres, et il me semble qu’on rit et qu’on applaudit. Après tout, je n’ai pas dans ma caisse en bois, une notion bien exacte de ce qui se passe dans la salle.

À la fin mon nom est prononcé, au milieu de faibles applaudissements, et j’ai le sentiment que la chose n’a pas porté, comme je l’aurais cru. Mais dans le moment, comme toute la salle, j’ai la préoccupation du retour, plus que de tout le reste.