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Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/43

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maux, même un peu sauvages, quand ils souffrent, cherchent à se rapprocher de l’homme, et à obtenir un peu de sa commisération. Voici cinq ou six jours, que la chatte est en mal de chats, eh bien ! voici la pauvre bête, dans sa souffrance ayant besoin qu’on soit près d’elle, et elle vous suit de ses deux grands yeux tristes, quand on s’éloigne, et elle vous salue d’un petit miaulement, quand on revient, et elle vous remercie de votre caresse, par un petit ronronnement tout doux. Vraiment ils sont curieux chez ces ignorants de la maladie, les regards profonds avec lesquels ils semblent vous demander de leur ôter leur mal.

Samedi 23 avril. — Déjeuner à Versailles avec les Daudet, chez le ménage Lafontaine.

Tout en servant, Lafontaine raconte — et comme un comédien raconte, avec des temps et des jeux de physionomie — cette jolie anecdote.

Il avait cédé, vendu un Ruysdael, trouvé en Hollande, à Adolphe Rothschild, et venait de le lui livrer, quand le baron dans la joie de son acquisition, se laissa aller à lui dire, en forme de politesse : « Mais, la baronne vous verrait avec plaisir ! » Et le baron entraîne Lafontaine dans une pièce, où la baronne montée sur un escabeau, et ceinte d’un tablier, nettoyait elle-même ses curiosités, entourée d’une vingtaine de larbins en mollets, qui lui passaient les