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Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/131

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JUSTICE POPULAIRE

ment était trop sévère, et la discussion commença. On se mit à crier avec acharnement : il s’agissait là du sort d’un homme, qui, de plus, était marié et père de trois enfants… de quoi ceux-ci et leur mère étaient-ils coupables ? L’homme avait une maison, une vigne, une paire de chevaux, quatre ânes pour les étrangers ; il avait gagné tout cela à la sueur de son front ; il lui en avait coûté bien du travail. Le pauvre Giuseppe était seul, dans un coin, et regardait ses juges d’un air sombre.

Assis sur une chaise, le dos voûté, la tête basse, il pétrissait son chapeau entre ses mains ; il en avait déjà arraché le ruban et en déchirait peu à peu les bords, tandis que ses doigts dansaient comme ceux d’un violoniste. Quand on lui demanda ce qu’il avait à dire, il répondit, après s’être redressé et levé avec beaucoup de peine :

— Je réclame votre indulgence. Personne n’est impeccable. Me chasser du lieu où j’ai vécu plus de trente ans, où mes ancêtres ont travaillé, ce ne serait pas juste !