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Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/255

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LA CONVERSION

ma compagnie, commença le serrurier. Les paysans s’étaient révoltés ; ceux-ci trouvaient les fermages trop élevés ; ceux-là criaient qu’il fallait augmenter leurs salaires ; les uns et les autres me parurent avoir tort ; je me disais : « Abaisser le loyer des fermes, élever les gages ! Ah ! non, ce sera la ruine des propriétaires fonciers. » En bon citoyen, je prenais ces revendications pour des sornettes et des stupidités… Et j’en étais très irrité. Ajoute à cela qu’il faisait chaud, que nous nous transportions sans cesse d’un endroit à l’autre ; la nuit, nous étions de garde, car nos gaillards brisaient les machines, mettaient le feu aux récoltes et sabotaient tout ce qui ne leur appartenait pas. C’était du joli !

Il lampa quelques petites gorgées de vin et continua en s’animant toujours davantage :

— Ils s’en allaient par les champs en bandes serrées, comme des moutons, mais des moutons silencieux, menaçants, préoccupés ; nous les chassions en exhibant nos baïonnettes, en donnant des coups de crosse parfois ; sans hâte et sans frayeur, ils se dis-