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Page:Gourmont - Le Livre des masques, 1921.djvu/54

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tions, de fugitifs décors ; une main nue qui s’appuie un peu crispée sur une table de marbre, un fruit qui oscille sous le vent et qui tombe, un étang abandonné, ces riens lui suffisent et le poème surgit, parfait et pur. Son vers est très évocateur ; en quelques syllabes, il nous impose sa vision.


Je sais de tristes eaux en qui meurent les soirs ;
Des fleurs que nul n’y cueille y tombent une à une…


Encore très différent en cela de Verhaeren, il est maître absolu de sa langue ; que ses poèmes soient le résultat d’un long ou d’un bref travail, ils ne portent nulle marque d’effort, et ce n’est pas sans étonnement, ni même sans admiration, que l’on suit la noble et droite chevauchée de ces belles strophes, haquenées blanches harnachées d’or qui s’enfoncent dans la gloire des soirs.

Riche et subtile, la poésie de M. de Régnier n’est jamais purement lyrique ; il enferme une idée dans le cercle enguirlandé de ses métaphores, et si vague ou si générale que soit cette idée, cela suffit à consolider le collier ; les perles