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Page:Gréville - Suzanne Normis, roman d'un père, 1877.djvu/15

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ROMAN D’UN PÈRE.

— ce que j’ai fait, il faut que tu le continues : promets-moi que, jusqu’à ce qu’elle soit grande, jusqu’à sept ans au moins, l’enfant couchera ici, — elle indiquait le petit lit ; — que tu ne la confieras pas à une bonne, même dévouée ; que son sommeil sera surveillé par toi, que…

L’oppression la saisit si fort, qu’elle pâlit, ferma les yeux, — je crus que c’était fini.

Quelques minutes après, je la croyais endormie, elle rouvrit les yeux.

— Le promets-tu ? dit-elle.

— Je le promets ! répondis-je, le cœur plein d’un ardent dévouement. Je te le jure sur nos six années de bonheur, sur la vie même de l’enfant !

— Et elle sera heureuse ?

— Elle sera heureuse, quand je devrais être malheureux ! Au prix de tous les sacrifices, elle sera heureuse !

Ma femme m’appela des yeux ; je la serrai sur mon cœur, et elle me rendit mon étreinte avec ses deux bras passés autour de mon cou.

— Vois-tu, me dit-elle après un silence, je l’ai bien aimée ; je crois que je l’ai aimée plus que toi, — mais c’est parce qu’elle était à toi.