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Page:Grandville - Cent Proverbes, 1845.djvu/417

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C’EST QUAND L’ENFANT EST BAPTISÉ, ETC.

qui se promènent pendant la journée dans la bonne ville de Naples, se retrouvent le soir à San-Carlino, représentés avec un naturel parfait. L’acteur principal est cet immortel Pulcinella, que nous avons traduit en français par une marionnette en bois qui n’a guère que des coups de bâton pour toute éloquence.

Le théâtre de San-Carlino, essentiellement satirique, a autant besoin de pièces nouvelles qu’un petit journal français a besoin de nouveaux articles. Or, ce qui causait le désespoir du pauvre directeur Geronimo Passavanti était précisément le manque absolu de pièces.

Il était brouillé, par des raisons que l’histoire ne nous dit pas, avec tous les auteurs qui alimentaient ordinairement son théâtre. La société des auteurs dramatiques n’était cependant pas encore inventée de ce temps-là à Paris, et encore moins à Naples, ce qui prouve bien que les intrigues, les brouilles, les discordes et les coalitions, sont plus vieilles que toutes les sociétés du monde.

De désespoir l’infortuné directeur s’arrachait donc les cheveux ; il en était déjà à sa troisième poignée, quand sa femme, la vénérable Barbara, lui dit :

— D’où vient votre peine, cher époux ? Ces maudits barbouilleurs de papier ont formé un complot contre vous ; eh bien ! ne sauriez-vous vous passer d’eux ? Ce matin, en rangeant mes coiffes, j’ai trouvé dans le fond d’un tiroir ce rouleau de papier, qui m’a tout l’air d’une pièce de théâtre. Que ne la faites-vous représenter ? Elle aura l’avantage de ne pas vous coûter un denier, et c’est peut-être saint Janvier qui vous l’envoie.

Bien que Geronimo Passavanti eût reçu une certaine