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Page:Grandville - Cent Proverbes, 1845.djvu/427

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RIEN N’EST BON, ETC.

quelques réprimandes. Comment souffrir, par exemple, qu’une femme jeune, riche, et qui n’a guère à s’occuper que de ses plaisirs, abandonne, par un pur caprice, des arts d’agrément qui doublent la beauté d’une jolie femme et rendent presque jolies celles qui n’ont qu’une figure médiocre ?

— Vous savez, Juliette, disait un jour à sa femme le comte de G., qu’en vous épousant j’ai reçu de vous la promesse que vous cultiveriez vos talents avec autant d’assiduité qu’autrefois. Vous avez une voix charmante, il est des morceaux que vous rendez mieux que des cantatrices de profession ; pourquoi votre piano reste-t-il fermé quelquefois des mois entiers ?

— Mon ami, j’ai depuis quelque temps la musique en horreur ; la vue seule de mon piano m’agace horriblement les nerfs.

— Sacrifions donc la musique ; mais la peinture, que vous a-t-elle fait ? Je me souviens que dans votre pension vous faisiez des bouquets de roses presque aussi bien que Redouté, et si vos aquarelles eussent été signées Decamps ou Delacroix, je suis persuadé que Susse les eût couvertes d’or. Cependant, votre boîte à couleurs reste fermée et votre king Charles est couché toute la journée sur votre palette.

— Est-ce ma faute, si tout ce que je fais en dessin ou en peinture me semble au-dessous du médiocre ? Si vous voulez, mon ami, ne pas me désoler, ne me forcez pas à reprendre ces pinceaux auxquels je voudrais n’avoir jamais touché de ma vie.

— Je me souviens aussi que, dans les premiers temps