Page:Grave - La Société future.djvu/163

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rait comparer à notre jeunesse dorée, une bande de joyeux viveurs dont la seule occupation est de faire l’amour et de perpétuer l’espèce. Comme nos jeunes bourgeois, ces aristocrates vivent du fruit du travail des autres, sans avoir jamais rien produit, mais ils ont cette excuse que, étant donnée la spécialisation des fonctions, ils sont indispensables au repeuplement de la ruche, puisque la classe travailleuse ne compte que des femelles au sexe avorté, que la génération normale ne pourrait s’accomplir sans eux, (besogne que les travailleurs humains n’entendent pas, je crois, résilier au profit de personne). Malgré cette excuse, une fois leur rôle rempli, — fécondation des femelles — les ouvrières s’empressent de les mettre à mort, n’aimant pas à nourrir des bouches devenues inutiles !

Et la reine ? cette fameuse reine ! dont on avait voulu faire l’emblème du pouvoir monarchique, elle aussi, a dû descendre de son trône, et se contenter d’un rôle plus modeste, mais plus utile.

Quand des savants, plus soucieux d’observer la réalité des faits que de chercher en eux la justification des prétentions des maîtres dont il y avait à espérer des pensions et des gratifications, étudièrent sérieusement les mœurs des ruches, ils reconnurent que la pseudo-reine était une mère de famille d’une fécondité « très rare chez les humains » puisque réellement, et non au figuré, elle était la mère de son peuple. Si elle était mieux soignée, mieux nourrie que les autres, semblant ne prendre part à aucun des travaux de la communauté, c’est qu’elle avait une occupation bien plus importante : pondre toujours et sans cesse, afin d’assurer la survivance de la colonie.