Page:Grave - La Société future.djvu/175

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Or, dans nos sociétés, nous voyons bien des lois punir les contraventions à l’ordre établi, mais cette sanction est si peu naturelle et si instable que ceux chargés de l’appliquer ne s’entendent pas entre eux. Quand vous nous aurez établi une société où chaque infraction à ses lois entraînera elle-même son châtiment, sans l’intervention arbitraire de ceux qui se sont faits les dispensateurs de la récompense et du châtiment, vous aurez le droit de la proclamer naturelle et de la comparer à un organisme. Actuellement elle n’est que désordre et confusion.


Nous l’avons déjà vu, l’idéal de l’économie politique serait de spécialiser les individus et de les parquer dans une case de leur échiquier social, sans qu’ils puissent en sortir. Tous les jours, on voit l’ouvrier devenir de moins en moins capable d’un travail entier, se confiner en une spécialité dont il ne sortira plus. Tel fera, toute sa vie, des têtes d’épingles, sans savoir comment s’aiguise la pointe. Tel autre estampera, durant son existence à l’aide d’une machine, la même pièce de métal, ignorant quelle place elle doit occuper dans le mécanisme entier. Voilà où nous mène la bourgeoisie, dans l’espérance de nous rendre encore plus dépendants de la besogne qu’elle nous aura assignée.

Les économistes bourgeois crient que les miséreux font trop d’enfants. Ils voudraient arriver à leur enlever cette dernière joie. Avec leur système de pousser la femme et l’enfant à l’atelier, ils voudraient arriver à éliminer, peu à peu, l’homme-ouvrier. On en conserverait quelques spécimens pour les emplois où il ne pourrait être remplacé par la femme ou l’enfant ;