Page:Grave - La Société future.djvu/203

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tourner mal contre leur système social, aussi, viennent-ils nous dire :

« L’homme est égoïste, cela est dans sa nature, et il n’y a pas moyen d’y remédier. D’un autre côté, la société, dont nous sommes le plus bel ornement, demande de la part des individus, beaucoup d’abnégation, beaucoup de sacrifices pour fonctionner divinement, nous allons, si vous le voulez bien, partager la poire en deux : ceux qui gouverneront et exploiteront les autres, pourront développer leur égoïsme en toute sécurité, ils en auront les moyens ; ceux qui seront gouvernés et exploités devront faire preuve de la plus parfaite abnégation pour se plier à ce que l’on exigera d’eux. Ce n’est qu’à ce prix que la société est possible ».

Aussi, le premier travail des religions a-t-il été de prêcher le respect des maîtres, l’humilité de l’individu, l’abnégation et le renoncement de soi-même. Le sacrifice pour ses semblables, pour la Patrie et la Société à l’avénement de la bourgeoisie.

Les moralistes — quelle engeance ! — sont venus, ensuite, démontrer que la société n’était possible et durable qu’à condition que l’individu se sacrifiât au bonheur de tous, qu’il renonçât à son autonomie, consentît à laisser rogner dans chacun de ses mouvements.

Comme de juste, les ignorants, les misérables, ont pris cela à la lettre, et voilà des milliers d’années qu’ils se laissent tondre, croyant travailler au profit de l’espèce humaine. Ceux qui possèdent, moins naïfs, se sont contentés de jouir et d’exploiter ces bons sentiments.

Mais chaque action produit sa réaction, d’autres