Page:Grave - Le Mouvement libertaire sous la IIIe République.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

contraire, y trouver une occasion de repartir avec une plus belle envolée si possible.

Quand ils eurent réintégré la prison, Kropotkine dît à Gautier :

— Tu as été magnifique. Mais ne t’étais-tu pas fourvoyé à un moment de ton discours ? Comment t’en serais-tu tiré, si l’avocat général ne t’avait pas interrompu ?

— Farceur ! fit Gautier, en le poussant du coude, n’as-tu pas remarqué que je me suis arrêté à un moment ? L’interruption était prévue, et comme elle ne venait pas, il fallait bien donner à Fabreguette le temps de la trouver.

Baillet qui le connaissait me disait qu’il apprenait ses discours devant sa glace, étudiant ses gestes. Parfait, sans doute, comme entraînement. Mais au bout de quelque temps de cette pratique, que reste-t-il de sincérité ?

Les arrestations avaient ralenti les correspondances de notre groupe avec ceux de province, mais cela n’empêchait pas que lorsqu’un camarade venait à Paris c’était chez moi qu’il descendait.

Pendant quelque temps, j’avais eu un camarade russe, qui travaillait avec moi. Après lui, ce fut Dejoux, le premier gérant du Droit Social qui me tomba du ciel.

Condamné à deux ans, qu’il n’avait nullement l’intention de faire, il avait quitté Lyon, Et comme il n’avait aucune relation à Paris, il resta avec moi.

Ce fut lui qui m’apprit beaucoup de choses sur Lyon. L’activité des camarades lyonnais ne devait pas s’arrêter aux quelques attentats qui s’étaient produits. Notre-Dame-de-Fourvière devait sauter. On avait dû, me dit-il, déjà y transporter de la dynamite. Mais par suite d’indiscrétions dans la correspondance avec Paris, le projet fut abandonné.

À propos de l’attentat de Bellecour, il me dit que le seul individu tué fut un anarchiste qui, doutant de son efficacité, avait résolu de l’empêcher. C’est en voulant éteindre la mèche de la bombe qu’il avait été victime de l’explosion.

De Cyvoct, l’auteur de l’attentat, il faisait de grandes