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Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/39

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moisson n’égrène pas au flanc des collines des groupes joyeux, — mais de tristes sauvages dans la vase jusqu’au genou et qui poussent, durant les nuits, des hurlements lugubres, pour disputer ce maigre bien aux oiseaux et aux fauves.

Il. ne faut pas croire que dans de tels pays où les voyages sont interminables et pénibles, on traverse des lieux toujours magnifiques. Il y a des chevauchées entre des murailles d’herbe qui vous dépassent ; des journées éternelles dans les forêts claires aux petits arbres rabougris dont les grandes feuilles sèches jonchent le sol et font sous les pas un bruit de métal, ou bien des heures et des heures sans fin sous une toiture de sampan, tandis que l’eau alentour est aveuglante.

Au surplus, tout est fatigue. La sueur coule le long du corps, le soleil brûle les yeux et la peau. Vous êtes brisé par le trot incertain du petit cheval, le tangage de votre éléphant ou les cahots de votre charrette. Des nuées de taons vous escortent. On ne peut s’asseoir par terre à l’ombre : les fourmis rouges sont partout et le moustique, messager de fièvre, est roi. Etes-vous en forêt ? Des ronces pendent en de minces filaments