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Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/45

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et s’amarra à un arbre compliqué tombé dans l’eau, mais dont le tronc, reprenant vie, se relevait blanc et arrondi comme un col de cygne.

De la berge, je voyais dans la cabine éclairée par le photophore qu’elle venait d’allumer la femme cambodgienne d’un de mes gens. La glace à la main, les jambes croisées, elle peignait ses courts cheveux où tout le jour elle avait mis des fleurs pour les parfumer. Sa main méticuleuse passait tantôt dans l’ombre et tantôt dans la lumière. Quelques ustensiles brillaient sans qu’on les distinguât, et devant une fenêtre, pendait encore l’écharpe orange, mise là contre le soleil.

Ce tableau, tout encadré par la porte de la jonque, tenait dans deux mètres carrés et semblait suspendu dans le paysage. Au delà, c’était la nuit de l’arbre retombant en voûte, l’eau où traînaient des clartés dernières et l’autre berge d’un noir profond.

Sur les bas-reliefs d’Angkor, on voit souvent, soit dans une embarcation, soit sous le toit d’une charrette, une princesse, la glace à la main, qui occupe les longueurs de la route à entretenir et à parer sa beauté.