Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/60

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

XI

Jeudi, 29 juillet.

Trois jours pour franchir cinquante kilomètres ! Mais je suis au pied du piton. La longue crête au bout de laquelle il est dressé, s’exhausse en allant vers le Sud de plus en plus, se brise tout d’un coup à près de sept cents mètres de hauteur et tombe à pic. Au delà, c’est le Siam. Il pleut.

Sous l’arceau geignant de ma charrette, harcelé par les taons, à mesure que les montagnes perdirent le bleu des lointains, j’ai cependant vu s’enfuir mes pressentiments. Les accidents se sont pourtant multipliés, depuis Chéom Khsan. Dix fois par jour, il fallut décharger les voitures pour leur faire passer, en flottant, les torrents ; et nous arrivions aux étapes à la lueur des torches.

Je me trouve donc à neuf jours de marche du Mékong, à douze d’Angkor. En cours de route, j’avais rencontré seulement quatre malheureux villages, de quelques maisons chacun. Voilà la chaîne infranchissable des monts couverte de forêts. Au Nord, c’est la mer des savanes siamoises ; au