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Page:Groulx - L'appel de la race, 1923.djvu/241

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DANS LA GRANDE ARÈNE

mystérieux, dans le calme apeuré de l’atmosphère et fait voir, aux branches des arbres, l’envers des feuilles. Du haut des tribunes, les lorgnettes dont le remuement faisait comme un chassé-croisé d’éclairs phosphorescents, plongeaient en bas, dans le quadrilatère du parquet. Là, se remuait la foule bigarrée des politiciens. Les initiés à la composition de la Chambre, en faisaient, pour les nouveaux venus, la géographie morale. Les uns se montraient du doigt le groupe des orangistes, des « jaunes », comme on disait, grogneurs par conviction et par métier, faces glabres et sèches, que paraissait réchauffer l’espérance d’un débat où il y aurait de la haine. D’autres reconnaissaient, à leur air ennuyé par la venue de cette discussion académique, à leurs allures enveloppantes et feutrées, à leur façon toujours mystérieuse de s’aborder, les profiteurs de la politique, les grands félins de l’intrigue et de la finance qui font tous les soirs le rêve des conquistadors, moins la vision des étoiles. Ce jour-là, sur bien des figures où voulait s’accentuer l’air rogue et bilieux, s’abattait plus profondément le melon noir ou le feutre « cow-boy ». Mais l’un des favoris des tribunes, c’était là, au premier rang, à l’avant de la gauche, le chef de l’opposition. Sa belle tête d’un modelé si pur, faite pour la statuaire, sa tenue digne et même quelque peu solennelle rappelait le parlementaire d’une époque évanouie et posait une fleur d’élégance, un noble archaïsme, dans cette Chambre aux allures de plus en plus