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Page:Groulx - Mes mémoires tome IV, 1974.djvu/143

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septième volume 1940-1950

Canada before Canada as a whole (Canon Groulx points out with considerable truth that English Canadians put English Canada before Canada as a whole)… »

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Longue digression peut-être que celle-là. Mais c’était le lieu, ce me semble, où l’inclure. Et elle explique, pour une part, quelques-uns de mes sentiments, au cours de ma carrière d’historien et de conférencier. Et je reviens à mes cours d’histoire au Manitoba. Passons rapidement. Les cours ont lieu dans la belle salle de l’Académie des Sœurs des Saints Noms de Jésus et de Marie. Le fait important, c’est l’auditoire : un auditoire d’une moyenne de 200 personnes : couventines, collégiens, religieux, prêtres, laïcs, auditeurs venus de Saint-Boniface et des environs. Le professeur y donne cinq cours sur « l’Évolution constitutionnelle du Canada jusqu’à nos jours ». Le Winnipeg Free Press, La Liberté et Le Patriote donnent de ces cours un bon résumé. Une sorte de forum, après chaque cours, où pleuvent les questions, me démontre l’intérêt que l’on prend à ces problèmes de l’histoire canadienne.

Ces leçons d’histoire, ai-je dit, coïncident avec le centenaire de la naissance de Louis Riel et l’on a voulu que le 11 novembre, dans l’après-midi, je prononce une conférence sur « Louis Riel et les événements de la Rivière-Rouge » devant l’élite manitobaine, au Collège des Jésuites. Dans une entrevue donnée au Devoir, à mon retour de l’Ouest, je note : « Nous n’imaginons guère dans l’Est, le regain de popularité que prend au Manitoba l’infortuné Riel, même dans les milieux anglophones. Singulière revanche de l’Histoire. » Le Père Recteur du Collège m’arrache aussi une causerie devant les collégiens. À ma question : De quoi leur parleraije ? il me répond en ponctuant ses mots : « Parlez-leur du Québec, de la vieille province, qu’ils ne connaissent guère. » Une fois de plus, devant ces jeunes gens qui m’écoutent avidement, je constate combien peu la « vieille province » rayonne en dehors de ses frontières, ne soigne guère sa publicité, même parmi ses fils exilés. En ce Manitoba de 1944, je découvre encore une volonté de survivance. L’espoir n’est pas éteint. On s’efforce de s’organiser, de s’entraider même économiquement par le moyen des coopératives.