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Page:Groulx - Mes mémoires tome IV, 1974.djvu/182

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septième volume 1940-1950

bons amis et qui ne commit jamais que le péché de faiblesse par excès de gentilhommerie.

Cher Monseigneur,

Pardonnez-moi de vous importuner de nouveau avec la question de ma pension. Ce sera la dernière fois.

La solution que vous me proposez vous-même et Mgr le Chancelier : reprendre mon enseignement, est, pour moi, absolument inacceptable. On a déjà pourvu à mon remplacement ; le budget de la Faculté des lettres en serait bouleversé ; au surplus la raison pour laquelle j’ai sollicité un arrangement de retraite par pension, c’est précisément la volonté ferme de ne pas empêcher l’avancement ou la rentrée à l’Université d’un ou deux jeunes. Or je ne pourrais retourner à mon enseignement sans les obliger à battre la semelle à la porte de la Faculté. Je chercherai donc autre chose et ailleurs. Il est un peu pénible, à mon âge, après trente-quatre ans de services, d’en être réduit à cette nécessité. Mais enfin, si, au cours de ma vie, j’ai perdu foi en bien des choses et en bien des hommes, j’ai gardé une foi intacte en la Providence.

Maintenant, voici deux points que j’aimerais préciser. Le premier — pour empêcher toute légende — je n’ai jamais sollicité moi-même de pension, pas plus que je n’ai démissionné. Sachant mon grand désir, depuis deux ans, de ne pas nuire à de plus jeunes, M. Frégault s’est offert à négocier pour moi une pension convenable. Je lui ai écrit une lettre à lui-même où je lui faisais deux observations : la 1ère, qu’après trente-quatre ans de services, j’espérais une pension qui me permît de continuer en paix mon travail ; la 2e, que je sollicitais cette pension, non pas à l’âge réglementaire de 65 ans, mais de 72 ans tout près.

En second lieu, je ne sais sur quelle base ou fondement, ces Messieurs de l’Administration ont distingué mes services à la leçon de mes services à plein temps à l’Université. En réalité, j’ai toujours servi l’Université à plein temps. Depuis 1915, date de mon entrée jusqu’à 1940, j’ai donné presque tout mon temps à l’Université, tout en étant obligé, faute de traitement, de gagner ma vie en dehors d’elle. De 1915 à 1940, et d’abord de 1915 à 1920, alors que la Faculté des lettres avait un public d’auditeurs, mais point d’étudiants en histoire, l’on m’a imposé la corvée de cinq, et même de six conférences publiques d’his-