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Page:Groulx - Mes mémoires tome IV, 1974.djvu/373

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mes mémoires

d’action, cerveau de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, à qui je dois d’avoir pu bâtir en cent leçons au poste CKAC, ma synthèse d’histoire du Canada. Maxime Raymond, mon ancien élève de Valleyfield, à prestance de gentilhomme de vieille race, mais si simple, si bon, fondateur de la « Fondation Lionel-Groulx », qui, dans les derniers temps de sa vie, passait me saluer presque tous les matins, attaché passionnément à la vie de notre petit peuple, tourmenté d’inquiétude sur les faits quotidiens, les faux pas de la politique, cherchant à se réconforter. Omer Héroux, mon publiciste si généreux, si prévenant, toujours à l’affût de mes moindres gestes, le journaliste à la correction si parfaite qui m’en imposait par son indéfectible pondération ou mesure et qui, par les larges horizons de son esprit, avait fait du Devoir, le véritable journal, le haut-parleur de tout le Canada français. Antonio Perrault, mon bras droit à l’Action française, brillant esprit, âme généreuse, qui aurait pu atteindre les plus hauts postes de la magistrature, mais qui perdit tout avancement par fidélité à ses convictions nationales. Le Père Papin Archambault, s.j., autre pile électrique, mon vieux compagnon du temps de l’Action française et je pourrais dire de toute ma vie active, le mouvement perpétuel, l’infatigable assiégeant qui m’aura arraché tant d’articles, tant de discours. Enfin plus modeste, mais non moins cher en mes souvenirs, Mgr Jean-Marie Phaneuf, compagnon de chaîne à Valleyfield, mon plus intime confident dans les années de la Croisade d’adolescents, admirateur comme moi, en nos années de séminaristes, du cher abbé Henri Perreyve, du Père Gratry, de Lacordaire, de Montalembert, d’Ozanam, âme ouverte à toutes nos exaltations de ce temps-là. Quelques morts seulement, mais de ceux-là dont le départ crée des vides profonds et donne l’impression de l’isolement dans la vie. Figures familières qu’on ne reverra plus. Confidents à qui l’on ne dira plus rien. Un chemin se ferme ; un autre, très court, s’ouvre devant vous, au bout duquel vous apercevez qui vous guette.