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Page:Grout - Passage de l'homme, 1943.djvu/13

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PASSAGE DE L’HOMME

lumière, et sans doute qu’il n’en serait jamais question. Puis elle alluma, dans la haute cheminée, des brindilles sèches de je ne sais quel arbre, d’un arbre, je crois, qui ne pousse qu’en ce pays. Cela brûla silencieusement — pas le moindre petit craquement — avec des flammes vertes et bleues. Et il y eut même des flammes violettes, et une fois, oui, tout juste une fois, une flamme rouge et qui, — écoutez-bien — se détacha soudain de l’âtre et s’envola toute vive dans la nuit de la cheminée.

La vieille me dit : « Asseyez-vous. Vous devez être fatigué : c’est tellement loin jusque chez nous ! » Elle me montra le fauteuil de droite, un haut fauteuil de paille, ces hauts fauteuils qui vous attendent toujours. Je m’assis et bourrai ma pipe. Je l’allumai à un tison, je me tassai dans mon fauteuil, et j’écoutai.

Parfois il me prenait comme une envie de dormir : la voix de la vieille, apparemment si monotone, y était sûrement pour quelque chose. Et puis, quand il semblait que j’allais sombrer, la voix de la vieille devenait étrangement haute, un peu comme ces prières, dans les couvents de femmes, derrière les grilles, et qui paraissaient s’endormir, et qui se réveillent tout d’un coup. La haute voix me