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Page:Guèvremont - Le survenant, 1945.djvu/83

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LE SURVENANT

— C’est ben toujours lui, le Gros-Gras. Il lui faut toute la place : les deux autres se tasseront, quoi !

Après les annonces le curé de Sainte-Anne entama la lecture de l’Évangile du jour : « En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles… !

… « Et alors on verra le Fils de l’homme venir sur une nuée avec une grande puissance et une grande majesté… »

… « Voyez le figuier et les autres arbres ; quand ils commencent à pousser, vous reconnaissez que l’été est proche… »

… « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. »

Au silence du prêtre la foule des fidèles ondula puis se courba dans un même mouvement comme les blés que l’habile faucheur couche d’un seul andain. L’abbé Lebrun replaça le signet noir, posa ses mains sur le bord de la chaire et, ayant promené son regard clair et calme sur ses ouailles, il prêcha. Il prêchait sans éclat, sans recherche, d’une voix monotone.

Ainsi que chaque dimanche, au début du sermon, Didace Beauchemin, attentif, la tête tournée vers la chaire, la main en cornet autour de sa bonne oreille, fit un effort pour écouter. Mais petit à petit il ramena son regard vers la nef, et le temporel eut vite le dessus :