Page:Guy de Maupassant - Notre Cœur.djvu/78

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née de demain est prise, et j’ai encore quatre ou cinq courses à faire avant le dîner.

Il se leva tout de suite saisi de peine, lui qui n’avait d’autre désir que de ne la plus quitter ; et, lui ayant baisé les mains, il s’en alla, le cœur un peu meurtri, mais plein d’espoir.

Ce furent quatre jours bien longs qu’il eut à passer. Il les traîna dans Paris, sans voir personne, préférant le silence aux voix et la solitude aux amis.

Il prit donc, le vendredi matin, le train express de huit heures. Il n’avait guère dormi, enfiévré par l’attente de ce voyage. Sa chambre noire, silencieuse, où passaient seulement les roulements des fiacres attardés, évocateurs des désirs de départ, l’avait, durant toute la nuit, oppressé comme une prison.

Dès qu’une lueur apparut entre les rideaux fermés, la lueur grise et triste du tout premier matin, il sauta du lit, ouvrit sa fenêtre et regarda le ciel. La peur du mauvais temps le hantait. Il faisait beau. Une brume légère flottait, présage de chaleur. Il s’habilla plus vite qu’il ne fallait, fut prêt deux heures trop tôt, le cœur rongé par l’impatience de quitter la maison, d’être en route enfin ; et son domestique dut aller chercher un fiacre, à peine sa toilette finie, par crainte de n’en point trouver.

Les premiers cahots de la voiture furent pour lui des secousses de bonheur ; mais quand il pénétra