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Page:Guyau - Les Problèmes de l’esthétique contemporaine.djvu/262

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Voilà tout le secret des littératures. » Le romantisme louche ici de bien près au « naturalisme » d’aujourd’hui. G. Flaubert, qui se rattache si étroitement aux romantiques, n’avait pas un moindre culte du mot pour le mot même. Quoiqu’il n’eût jamais fait de vers, il émettait cette théorie singulière, en contradiction avec les paroles précédemment citées par nous, qu’« un beau vers qui ne signifie rien est supérieur à un vers moins beau qui signifie quelque chose. » Si on prend au sérieux ces principes de poétique, il ne reste plus qu’à disposer en vers à rimes riches les belles sonorités empruntées à la langue turque du Bourgeois gentilhomme :


Marababa sahem, yoc salamalequi,
Carbulath onchalla, croc, catamalequi.


On ne reprochera pas du moins à ces vers de signifier quelque chose.

De tels principes étant admis par les chefs du mouvement romantique, il était facile de déterminer d’avance où ce mouvement devait aboutir. Derrière les grands talents et les penseurs allaient venir ceux qui ne penseraient plus et qui, chose extraordinaire, s’en feraient gloire. À toutes les époques de la littérature, à la fin de la poésie grecque et latine ou de notre propre poésie classique, un fait analogue s’était produit : la recherche du mot avait remplacé celle de l’idée ; mais ni les Callimaque, ni les Stace, ni les Delille n’avaient raisonné aussi bien les principes de leur art. Pour trouver l’exact pendant du « Parnasse contemporain, » il faut le chercher au temps où