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Page:Guyau - Les Problèmes de l’esthétique contemporaine.djvu/29

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CHAPITRE II
LE PLAISIR DU BEAU EST-IL EN OPPOSITION AVEC LE SENTIMENT DE L’UTILE, LE BESOIN ET LE DÉSIR ?

Dans les objets extérieurs — par exemple un pont, un viaduc, un vaisseau — l’utilité constitue toujours, comme telle, une certaine beauté ; cette beauté se résout tantôt dans une satisfaction de l’intelligence, qui trouve la chose bien adaptée à sa fin, tantôt dans une satisfaction de la sensibilité, qui trouve cette fin agréable et qui en jouit. Le charme de l’utile est donc à la fois dans son caractère ingénieux et constamment agréable. Un voiturier passant sur un chemin s’écriera avec enthousiasme : « La belle route ! » Par cette épithèle, il désignera tout à la fois l’art savant avec lequel elle a été construite et la facilité que rencontre sa voiture à glisser sur la chaussée unie, sans secousses et sans obstacles.

Sans doute ce charme de l’utile, que sentait si bien Socrate, n’est pas du genre le plus élevé. Dire, avec un certain réahste, que les halles centrales de Paris sont le plus splendide monument de l’architecture moderne.