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Page:Hérodote - Histoire, trad. Larcher, tome 1, 1850.djvu/51

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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

s’emparèrent de Marathon ; et, ayant assis leur camp dans cet endroit, ceux de leur parti s’y rendirent en foule, les uns d’Athènes, les autres des bourgades voisines, tous préférant la tyrannie à la liberté.

Les habitants de la ville ne firent aucune attention à Pisistrate tant qu’il fut occupé à lever de l’argent, et même après qu’il se fut rendu maître de Marathon. Mais, sur la nouvelle qu’il s’avançait de Marathon droit à Athènes, ils allèrent avec toutes leurs forces à sa rencontre. Cependant Pisistrate et les siens, étant partis de Marathon tous réunis en un même corps, approchaient de la ville. Ils arrivèrent près du temple de Minerve Pallénide[1], et ce fut en face de ce temple qu’ils assirent leur camp. Là un devin d’Acharnes, nommé Amphilyte, inspiré par les dieux, vint se présenter à Pisistrate, et, l’abordant, lui dit cet oracle en vers hexamètres : « Le filet est jeté, les rets sont tendus : la nuit, au clair de la lune, les thons s’y jetteront en foule. »

LXIII. Ainsi parla le devin, inspiré par le dieu. Pisistrate saisit le sens de l’oracle, l’accepta, et fit incontinent marcher son armée. Les citoyens d’Athènes avaient déjà pris leur repas, et se livraient les uns au jeu de dés, les autres au sommeil. Pisistrate, tombant sur eux avec ses troupes, les mit en déroute. Pendant la fuite, il s’avisa d’un moyen très-sage pour les tenir dispersés et les empêcher de se rallier. Il fit monter à cheval ses fils, et leur ordonna de prendre les devants. Ils atteignirent les fuyards, et les exhortèrent de la part de Pisistrate à prendre courage et à retourner chacun chez soi.

LXIV. Les Athéniens obéirent ; et Pisistrate, s’étant ainsi rendu maître d’Athènes pour la troisième fois, affermit sa tyrannie par le moyen de ses troupes auxiliaires, et des grandes sommes d’argent qu’il tirait en partie de l’Attique, et en partie du fleuve Strymon. Il l’affermit encore par sa conduite avec les Athéniens, qui avaient tenu ferme dans la dernière action, et qui n’avaient pas sur-le-champ pris la fuite. Il s’assura de leurs enfants, qu’il

  1. Ainsi nommée parce qu’elle avait un temple dans le bourg de Pallène.