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Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/313

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« Votre départ pour l’Europe est un coup de foudre qui m’a atterré et consterné. Vous m’exhortez, en partant, de continuer à servir la nation et à soutenir un ouvrage qui est sur le penchant de sa ruine. Croyez-vous sincèrement que je ne serai pas enveloppé dans la même disgrâce que vous ? Le coup n’est peut-être différé ou suspendu que pour être frappé avec plus d’éclat.

« Quoi qu’il en soit, je me suis toujours fait un devoir de déférer à vos conseils et de suivre vos lumières. Je ne me départirai en aucune conjoncture de ce respectueux et inviolable attachement qui a fait jusqu’ici mon bonheur et ma gloire et la fera toujours. J’attends les réponses de M. Godeheu pour me déterminer, quoique je sois persuadé comme vous qu’il est à propos que j’attende dans l’Inde les réponses de M. de Conflans. Si cependant je n’ai pas, dans le poste que j’occupe, la liberté d’agir et qu’on veuille me gouverner par les idées de gens ignorants et sans expérience, mon propre ouvrage dépérira entre mes mains, et l’on en conclura ou que je l’ai détruit moi-même par pique, ou qu’il n’était ni si beau ni si bien établi que vous et moi l’avions fait entendre. D’un autre côté, si la confiance dont vous m’avez honoré est la même dans M. Godeheu, j’avoue que je ne puis me dispenser de me prêter encore aux besoins de la nation et de la Compagnie ; ce n’est pas que j’attende que mes services seront récompensés, ni même avoués ; mais j’aurai comme vous l’avantage d’avoir servi la patrie, sans autres émoluments que la gloire de lui avoir été utile et la consolation de n’attribuer ses mépris et son ingratitude qu’à la