Aller au contenu

Page:Haraucourt - L’Âme nue, 1885.djvu/256

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


219
LE SOIR.




LES GIBETS


à léopold allard



J’avais marché vingt ans dans les steppes du monde,
Cherchant ces fleurs d’amour que la jeunesse blonde
Cueille au bord du chemin :
Pressant contre mon cœur le nid plein de mes rêves,
Je suivais les rocs noirs et le sable des grèves
Que bat l’orage humain.


Seul, je marchais, sans un murmure et sans un blâme,
Mais pensif comme ceux qui portent dans leur âme
La terreur d’être nés ;
Quand se dressa, debout sur la route suivie,
Le pilori sanglant où Dieu suspend la vie
De ceux qu’il a damnés.