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Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/152

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LA PEUR

chez le ministre. Je profite du congé pour aller voir le docteur. Il prétend que j’ai la monomanie de la persécution. Il me prescrit le repos et l’exercice, les douches et la campagne. Lubert me dit : « Pourquoi ne te prescrit-il pas d’avoir vingt mille francs de rente ? » Lubert a raison.

1er janvier. — Aujourd’hui, je commence l’année de ma mort. Il neige pour la première fois : je n’aime pas la neige, mais c’est tout de même triste de penser que je ne verrai plus tomber la première neige.

8 janvier. — En plein bureau d’omnibus, dans la foule, la même voix a crié : « Ta peau ! » Je me suis retourné, je n’ai rien vu. A-t-il donc lancé des amis à ma poursuite ?

15 janvier. — J’ai donné congé de mon appartement. Je déménagerai au 15 avril. Le petit boucher ne découvrira peut-être pas mon nouveau domicile, puisque sa peine n’expire que le 23 juillet.

21 janvier. — Anniversaire de la mort de Louis XVI. Pourquoi n’a-t-on pas guillotiné le petit boucher ? Ce doit être affreux, le froid du fer qui vous entre dans le corps !