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Page:Harvey - Les demi-civilisés, 1934.djvu/215

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les demi-civilisés

moin. Nous ne pouvions plus parler. Je sentais que toute explication était superflue, outrageante, et que, lui, il savait le mensonge de mes excuses.

Bouvier se tourna vers moi et ajouta :

— Vous connaissez toute l’histoire, maintenant. Qu’entendez-vous faire ?

— Vous mériteriez que je vous tue comme un mauvais chien. Je me réserve pour une autre tâche. Dès demain, je ferai sortir du cloître la fille de Meunier.

— Sa fille ! Vous êtes sûr que Dorothée est à Meunier ? Vous savez bien qu’un homme comme lui n’aurait pas tué Warren sans raison. L’argent ? Il en faisait tant qu’il voulait. C’est la jalousie, rien que la jalousie, qui a joué, cette nuit-là. Il arrivait souvent qu’Abel restât à terre, pour le commerce et l’espionnage de la police, quand Luc était en mer. La femme de Meunier, presque toujours seule, était d’une grande beauté. Elle avait les cheveux d’un blond qui faisait rêver, des yeux bleus et profonds, un de ces petits nez retroussés et sensuels que tous les hommes recherchent et aiment. Warren allait souvent chez elle. Il était irrésistible avec les femmes. Il arriva ce que vous devinez. Meunier eut vent de l’affaire. À Québec, tout le monde s’occupe de ces choses-là, et tout le monde cherche à savoir quels sont ceux qui s’aiment. C’est un des grands soucis des petites villes. Luc n’était pas fait pour être cocu content. Il a simplement supprimé l’amant de sa