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Page:Harvey - Les demi-civilisés, 1934.djvu/25

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les demi-civilisés

— Est-ce ma faute à moi, si cette furie est venue me relancer jusqu’ici ? Et toi, gamin, pourquoi les as-tu conduits ?

— Ce n’est pas la faute de Max, dit Marthe. Savait-il ton histoire, lui ? Pouvait-il se douter ? Mais toi, témoin de cette scène, pourquoi ne m’as-tu pas défendue ?

— Le frère de ma femme était là. Il voulait me tuer.

— Un homme d’honneur, dans ces occasions-là, ne crains pas de se faire tuer. Le moins qu’une femme puisse demander à un homme, c’est d’être un homme.

Marthe faisait passer ces mots sans colère, à travers le sang qui de sa bouche dégouttait sur sa robe.

— Je ne m’en irai pas avec toi, dit-elle encore. Max me reconduira. Jamais plus nous ne nous reverrons, entends-tu ?

— Fort bien. Je retourne à Québec dès ce soir.

Et il s’éloigna en haussant les épaules.

— Je ne croyais pas qu’il fût un lâche, murmura Marthe.

Je m’en allai avec elle, muet, terrifié. Je ne comprenais rien à ce qui venait de se passer.

Avant d’arriver à l’hôtel, mon amie me demanda tout bas :

— Mon petit Max, promets-moi que tu ne raconteras cette histoire à personne. Je pars demain. Je ne reviendrai peut-être plus jamais.

J’avais le cœur gros. Pour la première fois, je venais en contact avec une des grandes misères de l’homme.