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Page:Hawthorne - Contes étranges.djvu/99

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LE TRÉSOR

taine figure, s’il eût employé sa féconde imagination aux brillantes fictions de la poésie, au lieu de la jeter toujours à travers ses entreprises commerciales. Au demeurant, c’était un excellent homme, sans plus de défense qu’un enfant, probe, honorable, et ayant gardé de sa distinction native tout ce qu’une vie accidentée et de déplorables circonstances lui avaient permis de conserver.

IV

Pierre, debout sur les carreaux à moitié brisés de la vieille cuisine, jetait un triste regard autour de lui, lorsque ses yeux s’animèrent du feu de l’enthousiasme. Il leva le poing et en frappa énergiquement le manteau noirci de la cheminée.

— Allons, il est temps, dit-il, avec un pareil trésor sous la main, ce serait une folie de rester plus longtemps dans l’indigence. Demain matin je commencerai par le grenier, et ne m’arrêterai qu’après avoir jeté bas la maison.

Accroupie dans un coin de l’âtre comme une sorcière dans son taudis, se tenait une petite vieille très-occupée à ravauder une des deux paires de bas avec lesquels Pierre Goldthwaite préservait ses pieds de la gelée. Comme l’usure des semelles défiait toute reprise, elle avait coupé des morceaux d’un vieux gilet de laine pour en faire de nouvelles.

Thabita Porter était une ancienne servante de la famille, âgée de plus de soixante ans sur lesquels elle en avait passé plus de cinquante dans le même coin de la cheminée, depuis le jour où le grand-père de Pierre l’avait recueillie chez lui. Elle n’avait d’autre ami que Pierre, ni Pierre d’autre société que Thabita ; aussi longtemps que Pierre