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Page:Helvétius - Œuvres complètes d’Helvétius, tome 13.djvu/78

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Eh quoi ! dit-il, eh quoi ! la foudre vengeresse
Epargne encor l’autel de la scélératesse !
Et depuis quand les dieux, ennemis des humains,
Trempent-ils dans le sang leurs bienfaisantes mains ?
Quel sénat assemblé sous cette voûte obscure ?
Qui s’assoit sur l’autel ? Que vois-je ? l’Imposture !
C’est le superbe Eblis, grand-prêtre d’Ariman,
Qui, pontife et monarque, y regne insolemment.
Une jeune Indienne en ces lieux amenée
Doit être en cet instant aux flammes condamnée.
Mais tu la vois paroître. Il faut, lui dit Eblis,
Encenser aujourd’hui le dieu de mon pays.
Que je l’encense ou non, que t’importe ? dit-elle.
J’ai, jusqu’à ce moment, à la vertu fidele,
Adoré, comme Eblis, un être bienfaisant,
Dans un lieu, sous un nom, peut-être différent ;
Si le dieu que tu sers protege l’innocence,
C’est le crime qui peut allumer sa vengeance.
Ce dieu, dont l’indulgence égale le pouvoir,
Demande seulement ce qu’on croit lui devoir.
Ton dieu peut tout ; en bien ! qu’il se fasse connoître :
Mon cœur est dans ses mains, lui seul en est le maître.
A son ordre puissant tout fléchit et se tait.
Je crois quand il le veut, et non quand il me plaît.