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246 ECRIVAINS ERANCISES

liste, Edgar Poe, et quatre romanciers plus ou moins réalistes : Charles Dickens, Tourguénef, Dostoïewski et Tolstoï. Laissons ces derniers qui forment un groupe naturel et considérons ce que nous avons appris sur l’art du seul lyrique que nous avons été amené à connaître.

Pour peu qu’on ait lu, on sait que le mot poésie ne saurait être appliqué à toutes les œuvres où l’expression affecté une forme rhythmique fixe, à toutes les œuvres versifiées. Les vers des comédies modernes par exemple, ou de Molière, n’ont rien de poétique ni ceux de la plupart des poèmes didactiques, des fables, de plusieurs épopées. D’autre part, la prose peut être poétique ; de Rousseau à Chateaubriand et aux romanciers modernes, il s’est produit en France de nombreux écrits qui ont pour caractère particulier d’exprimer, en une parole librement cadencée, le genre d’émotions élevées et vagues que suggèrent les beaux vers. La forme métrique n’a pu paraître seule capable de rendre ces sentiments d’essor et d’extase que probablement parce qu’elle fut à l’origine toute la littérature et que le charme musical qu’elle possède l’a fait réserver peu à peu aux sujets les plus nobles.

Mais on peut assembler en une mesure harmonieuse de douze, dix, huit syllabes, des mots ne présentant à l’esprit rien de poétique ; il est des vers admirables nuisicalement et techniquement, faits de noms propres d’inconnus ; enfin des mots dont l’ensemble manque de nombre, peuvent donner la grande impression du lyrisme ; il faut donc qu’il y ait quelque caractère intrinsèque des mots ou plus