Aller au contenu

Page:Henriet - Le paysagiste aux champs, 1876.djvu/147

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
114
LE PAYSAGISTE AUX CHAMPS.

Rien n’échappe à l’œil attentif et impressionnable de l’artiste. Le troupeau qui passe, la porteuse d’herbe courbée sous son vert fardeau, une ménagère vaquant sur le seuil de sa porte, une jeune mère allaitant un enfant, suffisent pour donner leur sens et leur valeur au buisson, à la chaumière, au chemin creux, au pli de terrain, qui sans cela fussent restés sans intérêt.

Parfois une marmotte orangée, un bourgeron bleu, un fichu rouge jettent le piquant contraste d’une note vive dans les douces harmonies du paysage. D’autres fois, des vêtements usés, déteints, sans couleur appréciable, font valoir précisément par leur tonalité neutre et discrète les gaietés du tableau. Est-ce simple effet de la loi des oppositions, ou serait-ce le privilège de la figure humaine, aussitôt qu’elle apparaît, de donner à tout ce qui l’entoure la valeur accessoire d’un cadre ?

Oui, dirons-nous, si le théâtre est étroit, si la scène est familière ; non, si le paysage s’élève assez haut dans l’échelle de l’art pour être théâtre et drame tout ensemble. Ces conceptions prennent alors un sens général, dans lequel l’homme disparaît et s’efface. Mais par cela seul qu’elles appartiennent à un ordre supé-