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Page:Hippocrate - Œuvres complètes, traduction Littré, 1839 volume 1.djvu/562

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appendice à l’introduction.

prééminence d’un livre imprime sur les manuscrits. En cela il a parfaitement raison ; mais l’édition d’Alde, qui fut alors un grand service pour tous les médecins lisant le grec, a justement le défaut de représenter trop fidèlement les manuscrits. Il n’y a pas une note, pas une variante, pas un alinéa ; de sorte qu’il faut être très familiarisé avec la lecture des livres hippocratiques, pour pouvoir user avec facilité de ce volume ; aussi cette édition est-elle aujourd’hui hors d’usage ; mais elle est encore utile à ceux qui étudient le texte hippocratique, soit pour le corriger, soit pour le publier de nouveau. Elle a été faite sur des manuscrits différents de ceux qui ont servi à Cornarius, à Mercuriali et à Foes, et dont le texte a été reproduit généralement par Chartier, Vander Linden et Mack ; et à ce titre elle mérite d’être consultée. Aussi y trouve-t-on des variantes qui ont quelquefois une grande importance ; j’en citerai un exemple : on lit dans le traité de l’Ancienne médecine, édition de Froben., p. 5, l. 18 : οὒτ ἂν ἐζητήθη (la médecine)· οὐδὲν γὰρ αὐτῆς ἔδει τοῖσι κάμνουσι τῶν ἀνθρώπον, τὰ αὐτὰ διαιτωμένοισί τε καὶ προσφερομένοισιν, ἅπερ ὑγιαίνοντες ἐσθίουσι καὶ πίνουσι, καὶ κατ’ ἄλλα διαιτωμένοις ξυνέφερε, εἰ μὴ ἦν ἕτερα τουτέων βελτίω. Cette phrase n’est pas intelligible, elle se trouve dans Mercuriali, dans Foes et dans les autres. Mais l’édition d’Alde dit autrement : au lieu de κατ’ ἄλλα διαιτωμένοις ξυνέφερε, εἰ μὴ, elle a κατ’ ἄλλα διαιτέονται ξυνέφερε καὶ εἰ μὴ, ce qui est la véritable leçon ; et pour restaurer toute la phrase avec l’édition d’Alde, il suffisait de remarquer que οὐδὲν γὰρ αὐτῆς ἔδει est une parenthèse, et qu’il manquait seulement εἰ après ἔδει ; la conjonction n’a été ainsi perdue qu’à cause de ἔδει, terminé lui-même par ει, faute souvent commise dans des circonstances semblables par les copistes de manuscrits. De plus, le καὶ donné par Alde après ξυνέφερε est très important, et aurait suffi pour faire soupçonner que εἰ devant μὴ devait avoir été précédé d’un autre εἰ gouvernant le verbe ξυνέφερε. On peut encore ajouter que ξυνέφερε devant εἰ dans Froben et Foes, au lieu de ξυνέφερεν, annonçait très probablement l’omission d’un mot commençant par une consonne, et que ce mot est καὶ donné par Alde. Au reste, les manuscrits à la main, je ferai voir en lieu et place que telle est la véritable leçon.