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Page:Histoire du donjon de Loches par M. Edmond Gautier.djvu/128

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d’héritage et de conquête, avait épousé Bonne de Savoie, ce qui le faisait beau-frère de Louis XI.

En mourant il laissait un fils, Jean-Galéas-Marie, qui devait lui succéder sous la tutelle du conseiller d’État Celus Simonetta. Ludovic s’empara de la tutelle de son neveu, fit trancher la tête au vieux Simonetta, et contraignit sa belle-sœur à se réfugier près du roi de France. Jean-Galéas-Marie mourut en 1494 d’un poison lent que Ludovic lui avait fait donner. Il laissait aussi lui un fils, François, que sa mère, Isabelle d’Aragon, ne crut pouvoir sauver qu’en l’envoyant en France. L’héritier du duc de Milan fut placé dans le monastère de Marmoutier, dont il devint abbé ; mais plus propre, ainsi que tous ceux de sa race, aux exercices guerriers qu’aux austérités du cloître, il mourut d’une chute de cheval dans une partie de chasse, sans laisser des souvenirs bien édifiants. Ludovic alors s’empara sans conteste de l’héritage de son neveu.

Tel était l’homme que Louis XII, héritier du Milanais par son aïeule Valentine Visconti, venait de voir tomber entre ses mains à la bataille de Novare, et qu’il se croyait, peut-être avec raison, en droit de traiter à la fois comme un assassin et un voleur d’héritage, comme un ennemi politique et privé.

Et cependant, par un de ces contrastes violents assez ordinaires dans les natures supérieures, Ludovic avait les qualités qui font les grands princes. Il aimait les arts, et sous sa vigoureuse impulsion, les sciences reprirent une nouvelle vie ; dans sa période de prospérité, il avait enrichi Milan des œuvres immortelles de Léonard de Vinci et de Bramante ; il avait creusé à Novare ce canal de la Mora qui porte son nom, et grâce auquel le Novarais et la Lomelline sont aujourd’hui de riantes et florissantes provinces ; poète lui-même à ses heures, il avait peuplé sa cour de