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Page:Homère - Iliade, trad. Leconte de Lisle.djvu/320

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— Hélas ! si j’abandonne ces belles armes et Patroklos qui est mort pour ma cause, les Danaens qui me verront seront indignés ; mais si je combats seul contre Hektôr et les Troiens, je crains que cette multitude m’enveloppe, car Hektôr au casque mouvant mène avec lui tous les Troiens. Mais pourquoi délibérer dans ma chère âme ? Quand un homme veut lutter contre un autre homme qu’un Dieu honore, aussitôt une lourde calamité est suspendue sur lui. C’est pourquoi aucun Danaen ne me blâmera de me retirer devant Hektôr, puisqu’il est poussé par un Dieu. Si j’entendais le brave Aias dans la mêlée, nous retournerions tous deux au combat, même contre un Dieu, et nous sauverions ce cadavre pour le Pèléide Akhilleus, et dans nos maux ceci serait pour le mieux.

Et tandis qu’il délibérait dans son esprit et dans son cœur, les phalanges Troiennes arrivaient conduites par Hektôr. Ménélaos recula et abandonna le cadavre, mais en se retournant, comme un lion à longue barbe que les chiens et les bergers chassent de l’étable avec des lances et des cris, et dont le cœur farouche est troublé, et qui ne s’éloigne qu’à regret de l’enclos. Ainsi le blond Ménélaos s’éloigna de Patroklos. Et il se retourna dès qu’il eut rejoint ses compagnons, et, cherchant partout des yeux le grand Aias Télamônien, il le vit à la gauche de la mêlée, exhortant ses compagnons et les excitant à combattre, car Phoibos Apollôn avait jeté une grande terreur en eux. Et Ménélaos courut à lui et lui dit aussitôt :

— Aias, viens, ami ! hâtons-nous pour Patroklos qui est mort, et rapportons au moins son cadavre à Akhilleus, car c’est Hektôr au casque mouvant qui a ses armes.

Il parla ainsi, et l’âme du brave Aias fut remuée, et il se jeta aux premiers rangs, avec le blond Ménélaos.

Et le Priamide, après avoir dépouillé Patroklos de ses armes illustres, l’entraînait pour lui couper la tête avec