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MYSTÉRIEUX
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prendre, avant d’avoir quitté le Canada, que je suis le mari de Joséphine Pezard de la Touche.

— Cependant, M. l’intendant, il faut prendre un parti.

— Il n’y a rien à faire, répondit celui-ci avec découragement. Je suis comme un homme qui, gravissant un roc entouré de précipices, se voit tout à coup arrêté à quelques pas du sommet, alors que le retour est impraticable ; je touche au faîte, je ne puis l’atteindre, et sous mes pieds s’ouvre un abîme prêt à m’engloutir.

— Jugez mieux de votre position, M. l’intendant. Si nous tenons votre mariage secret, rien n’est encore désespéré. Je vais trouver madame. Elle me hait parce qu’elle sait que je vous ai toujours manifesté une vive opposition contre ce qu’elle appelle ses droits, mais dans ce moment elle m’écoutera probablement, lorsque je lui aurai exposé le danger dans lequel un mot imprudent peut vous plonger.

— Non, Deschesnaux, j’ai réfléchi : j’irai moi-même parler à Joséphine. Allons, suivez-moi.

Deschesnaux, malgré toute la répugnance qu’il éprouvait à se rendre à cet ordre, fut forcé d’obéir. Ils arrivèrent à la porte de la chambre où la malheureuse femme était couchée sur un lit de repos. Elle tourna ses regards au bruit de la porte qui s’ouvrait, et, apercevant d’abord Deschesnaux, elle s’écria en se levant debout :

— Misérable ! venez-vous pour exécuter un de vos abominables projets ?

Puis, voyant M. Hocquart, qui semblait hésiter à entrer, comme enchaîné par la honte, elle ajouta en se calmant :

— Mon mari ! mon cher mari ! Ah ! si tu savais comme je suis affligée de la scène de ce matin ! Mais en te revoyant, je suis heureuse.