ODE QUINZIÈME.
À MES AMIS.
Oh ! combien est heureux celui qui, solitaire,
Ne va point mendiant de ce sot populaire
L’appui ni la faveur ; qui, paisible, s’étant
Retiré de la cour et du monde inconstant,
Ne s’entremêlant point des affaires publiques,
Ne s’assujettissant aux plaisirs tyranniques
D’un seigneur ignorant et ne vivant qu’à soi,
Est lui-même sa cour, son seigneur et son roi !
Sans monter au char de victoire,
Meurt le poëte créateur :
Son siècle est trop près de sa gloire
Pour en mesurer la hauteur.
C’est Bélisaire au Capitole :
La foule court à quelque idole,
Et jette en passant une obole
Au mendiant triomphateur.
Amis, dans ma douce retraite
À tous vos maux je dis adieu.
Là, ma vie est molle et secrète.
J’ai des autels pour chaque dieu.
Le myrte, qu’au laurier j’enchaîne,
Y croît sous l’ombrage du chêne ;
- ↑ Cette épigraphe a remplacé, dans l’édition de 1828, celle de l’édition originale, Nouvelles Odes, 1824. (Note de l’éditeur.)