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Page:Hugo - Actes et paroles - volume 3.djvu/148

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les fécondations merveilleuses du progrès par le progrès ; la science aux prises avec la création ; des ateliers toujours ouverts dont la misère n’aurait qu’à pousser la porte pour devenir le travail ; des écoles toujours ouvertes dont l’ignorance n’aurait qu’à pousser la porte pour devenir la lumière ; des gymnases gratuits et obligatoires où les aptitudes seules marqueraient les limites de l’enseignement, où l’enfant pauvre recevrait la même culture que l’enfant riche ; des scrutins où la femme voterait comme l’homme. Car le vieux monde du passé trouve la femme bonne pour les responsabilités civiles, commerciales, pénales, il trouve la femme bonne pour la prison, pour Clichy, pour le bagne, pour le cachot, pour l’échafaud ; nous, nous trouvons la femme bonne pour la dignité et pour la liberté ; il trouve la femme bonne pour l’esclavage et pour la mort, nous la trouvons bonne pour la vie ; il admet la femme comme personne publique pour la souffrance et pour la peine, nous l’admettons comme personne publique pour le droit. Nous ne disons pas : âme de première qualité, l’homme ; âme de deuxième qualité, la femme. Nous proclamons la femme notre égale, avec le respect de plus. Ô femme, mère, compagne, sœur, éternelle mineure, éternelle esclave, éternelle sacrifiée, éternelle martyre, nous vous relèverons ! De tout ceci le vieux monde nous raille, je le sais. Le droit de la femme, proclamé par nous, est le sujet principal de sa gaîté. Un jour, à l’assemblée, un interrupteur me cria : ― C’est surtout avec ça, les femmes, que vous nous faites rire. ― Et vous, lui répondis-je, c’est surtout avec ça, les femmes, que vous nous faites pleurer.

Je reprends, et j’achève cette esquisse.

Au faîte de cette splendeur universelle, l’Angleterre et la France rayonneraient ; car elles sont les aînées de la civilisation actuelle ; elles sont au dix-neuvième siècle les deux nations mères ; elles éclairent au genre humain en marche les deux routes du réel et du possible ; elles portent les deux flambeaux, l’une le fait, l’autre l’idée. Elles rivaliseraient sans se nuire ni s’entraver. Au fond, et à voir les choses de la hauteur philosophique, ― permettez-moi cette parenthèse ― il n’y a jamais eu entre elles d’autre antipathie que ce désir d’aller au delà, cette