Aller au contenu

Page:Hugo - Actes et paroles - volume 3.djvu/75

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.




II


SUR LA TOMBE DE LOUISE JULIEN


CIMETIERE DE SAINT-JEAN


26 juillet 1853.



Citoyens,

Trois cercueils en quatre mois.

La mort se hâte, et Dieu nous délivre un à un.

Nous ne t’accusons pas, nous te remercions, Dieu puissant qui nous rouvres, à nous exilés, les portes de la patrie éternelle !

Cette fois, l’être inanimé et cher que nous apportons à la tombe, c’est une femme.

Le 21 janvier dernier, une femme fut arrêtée chez elle par le sieur Boudrot, commissaire de police à Paris. Cette femme, jeune encore, elle avait trente-cinq ans ; mais estropiée et infirme, fut envoyée à la préfecture et enfermée dans la cellule nº 1, dite cellule d’essai. Cette cellule, sorte de cage de sept à huit pieds carrés à peu près, sans air et sans jour, la malheureuse prisonnière l’a peinte d’un mot ; elle l’appelle : cellule-tombeau ; elle dit, je cite ses propres paroles : « C’est dans cette cellule-tombeau, qu’estropiée, malade, j’ai passé vingt et un jours, collant mes lèvres d’heure en heure contre le treillage pour aspirer un peu d’air vital et ne pas