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Page:Hugo - Les Contemplations, Nelson, 1856.djvu/79

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Horreur ! et vous voilà poussant des cris d’hyène
À travers les barreaux de la Quotidienne.

Vous épuisez sur moi tout votre calepin,
Et le père Bouhours et le père Rapin ;
Et m’écrasant avec tous les noms qu’on vénère,
Vous lâchez le grand mot : Révolutionnaire.

Et, sur ce, les pédants en chœur disent : Amen !
On m’empoigne ; on me fait passer mon examen ;
La Sorbonne bredouille et l’école griffonne ;
De vingt plumes jaillit la colère bouffonne :
— Que veulent ces affreux novateurs ? ça, des vers !
Devant leurs livres noirs, la nuit, dans l’ombre ouverts,
Les lectrices ont peur au fond de leurs alcôves.
Le Pinde entend rugir leurs rimes bêtes fauves
Et frémit. Par leur faute aujourd’hui tout est mort ;
L’alexandrin saisit la césure, et la mord ;
Comme le sanglier dans l’herbe et dans la sauge,
Au beau milieu du vers l’enjambement patauge ;
Que va-t-on devenir ? Richelet s’obscurcit.
Il faut à toute chose un Magister dixit.
Revenons à la règle, et sortons de l’opprobre ;
L’Hippocrène est de l’eau ; donc le beau, c’est le sobre.
Les vrais sages, ayant la raison pour lien,
Ont toujours consulté, sur l’art, Quintilien,
Sur l’algèbre, Leibnitz, sur la guerre, Végèce. —

Quand l’impuissance écrit, elle signe : Sagesse.

Je ne vois pas pourquoi je ne vous dirais point
Ce qu’à d’autres j’ai dit sans leur montrer le poing.
Eh bien, démasquons-nous ! c’est vrai, notre âme est noire ;
Sortons du domino nommé forme oratoire.
On nous a vus, poussant vers un autre horizon
La langue, avec la rime entraînant la raison,